C’est la rentrée, la fin de l’été, et la fin de nombreux festivals qui se sont tenus dans toute la France, en Europe et dans le monde. Pendant cette période, les associations engagées contre les violences contre les femmes ne sont pas vraiment en vacances : c’est aussi durant ces événements qu’ont lieu de nombreuses agressions sexuelles et parfois même des viols.
Nombreux ont été les articles sur le sujet cet été, avec pour exemple des festivals qui ont marqué les esprits en Suède ou au Danemark. L’édition 2018 du festival suédois Bråvalla, par exemple, ne tiendra pas son édition 2018 suite à des agressions sexuelles et viols en 2017. L’interruption d’un concert par le chanteur du groupe Architects suite à une agression sexuelle en août a également fait parler cet été. Ces faits rappellent combien les violences contre les femmes sont massives et sont présentes dans toutes les sphères de la vie sociale.
Ces derniers jours, c’est le festival Rock en Seine qui était à la Une : pour la première fois, le festival se dotait d’un stand pour prévenir les agressions sexuelles, stand animé par l’association En Avant Toute(s).
L’association, que nous vous présentions en février, était présente sur plusieurs festivals cet été (Solidays, festival Causette) et a tenu des stands pour prévenir les situations de harcèlement sexuel, d’agressions sexuelles, de viols. Ces stands ont aussi été l’occasion de pouvoir discuter avec les festivaliers et festivalières des stéréotypes et de recueillir la parole des jeunes femmes victimes, si elles le souhaitaient.
Pour en parler, nous avons rencontré Louise Delavier, chargée de projet et responsable de la communication de l’association.
Vous avez tenu un stand à Rock en Seine, au festival Causette et à Solidays cette année, en quoi consistaient-ils ?
Nos stands sont avant tout dédiés à la prévention de terrain, auprès d’un large public. Nous proposons plusieurs jeux aux thématiques diverses, ayant pour objectif d’ouvrir la discussion et de déconstruire plusieurs stéréotypes sexistes.
Nos animations couvrent des domaines allant de l’égalité professionnelle aux stéréotypes autour des violences sexistes, en passant par la prise de conscience de l’image des femmes véhiculée par les médias et l’art. Nous nous appuyons sur ce que les festivalier.ère.s nous disent pour déconstruire les stéréotypes sexistes, racistes, homophobes, relatifs au slutshaming (comportements qui visent à rabaisser et intimider des femmes à partir de leurs comportements sexuels), etc.
D’autres animations consistent à changer le regard sur le corps et les qualités valorisées dans la société, dans une perspective d’empowerment (autonomisation des femmes).
Enfin, nous proposons une animation qui vise à libérer la parole, le « Wonder relou », sur lequel les femmes ont l’opportunité de témoigner autour du sexisme, du harcèlement et des agressions qu’elles vivent. Cette initiative nous permet de libérer la parole, de sensibiliser autour des agressions sexuelles et sexistes et d’insister sur leur caractère systémique.
Pourquoi la prévention sur le terrain est nécessaire ?
La prévention sur le terrain est nécessaire car il s’agit de moments où l’on a l’opportunité de parler directement avec le public, ce qui nous permet d’identifier très facilement où s’ancrent les stéréotypes, de permettre aux gens de se questionner et de voir les choses autrement.
De plus, nous profitons des festivals pour mettre l’accent sur les agressions sexuelles et responsabiliser les festivalier.ère.s, qui peuvent tous.tes potentiellement assister à ces violences et ont la possibilité d’agir. Nous insistons donc sur le rôle de témoin et sur la solidarité. Nous savons que c’est aussi parce que les agressions sexuelles sont trop souvent observées avec passivité que le sentiment d’impunité est si important.
Que peut-on espérer des prochaines éditions de festivals en France sur cette thématique ?
Nous espérons que cette question, qui a déjà commencé à émerger dans le débat public, prendra encore davantage d’ampleur. Avoir un stand de sensibilisation, un espace où les femmes peuvent parler, c’est bien… mais il faudrait sensibiliser chaque bénévole, chaque membre des équipes, ainsi que les forces de police et de gendarmerie pour que le relai se fasse efficacement. Nous espérons que la mobilisation enclenchée cette année ne faiblira pas, et que d’autres festivals se saisiront de la question. C’est un chantier de longue haleine, qui nécessite une véritable volonté politique.
On peut donc souhaiter aux prochains festivals français qu’ils se dotent, eux aussi, de stands de prévention, permettant aux victimes de pouvoir être entendues si elles le souhaitent, mais aussi de pouvoir discuter du sujet pour faire reculer les violences dans les festivals, qui devraient normalement être des lieux de bienveillance et de partage.