J’ai participé ce 29 novembre à la 8ème rencontre de Bagnolet autour des violences faites aux femmes, portant sur le thème des mutilations sexuelles féminines. Une journée d’interventions a suffi à balayer mes idées reçues sur le thème.
J’ai appris que l’excision n’était pas qu’une violence sexuelle, mais également une violence physique et psychologique dont les conséquences sur les femmes ou les enfants qui en sont victimes sont lourdes : absence de plaisir sexuel, douleurs et problèmes de santé multiples, syndrome post-traumatique, exclusion sociale, etc. C’est la raison pour laquelle l’Institut en santé génésique de Saint Germain en Laye, spécialisé dans la prise en charge des femmes victimes de violences et représenté par le Dr Pierre Foldès, propose une prise en charge globale et pluridisciplinaire, au-delà de la chirurgie réparatrice.
J’ai appris qu’il s’agit d’une pratique transversale à de nombreuses cultures et que si le nombre de femmes ayant subi des mutilations sexuelles à travers le monde est passé de 130 à 200 millions en 2016, c’est parce que de nouvelles zones géographiques, notamment en Asie, sont désormais intégrées dans le décompte. Selon Isabelle Gillette-Faye, sociologue et directrice du GAMS (Groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles, des mariages forcés et autres pratiques traditionnelles néfastes à la santé des femmes et des enfants), il s’agit à la fois d’une pratique ancrée dans les systèmes sociaux des groupes au sein desquels elle perdure, mais également d’une manne financière pour exciseuses et professions médicales et paramédicales.
J’ai appris que certains médecins gynécologues ou obstétricien.ne.s ne sont pas capables de reconnaître les mutilations sexuelles, et que d’autres se disent gêné.e.s d’aborder la question avec les femmes concernées. Heureusement, la MIPROF (Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains) propose depuis plusieurs années, avec la Dre Emmanuelle Piet, du CFCV (collectif féministe contre le viol), et le Dr Pierre Foldès, des formations en direction des professionnel.le.s de santé pour leur permettre de repérer et d’accompagner les femmes victimes de violences.
J’ai appris qu’à Saint-Denis, 16% des femmes qui accouchent aujourd’hui sont mutilées sexuellement. Et que sur le terrain, les réponses s’organisent, comme l’unité de prise en charge des femmes victimes de mutilations sexuelles féminines de la maternité Angélique-du-Coudray de l’Hôpital Delafontaine de Saint-Denis, ou la Maison des femmes, lieu d’accueil, de consultation, de prévention et d’orientation pour toutes les femmes en difficulté, confrontées à une grossesse non désirée, à des violences conjugales et sexuelles, ou à l’excision, créées par la Dre Ghada Hatem-Gantzer, et pour la dernière, coordonnée par Mathilde Delespine.
J’ai appris que pendant très longtemps la justice française a considéré les mutilations sexuelles comme des délits, jugés en tribunal correctionnel. Qu’il a fallu le courage d’avocat.e.s comme Linda Weil-Curiel et d’associations comme la CAMS (Commission pour l’abolition des mutilations sexuelles féminines) portées parties civiles, pour que ces faits soient qualifiés de crimes (au titre de violences, puis de tortures ou actes de barbarie) et jugés par les cours d’assises. Qu’on les traite avec la gravité nécessaire pour reconnaître les atteintes multiples et durables subies par ces femmes.
Et j’y ai découvert des personnes dont l’intégrité, le courage et la ténacité sont à la hauteur de la lutte engagée contre la volonté de contrôle des hommes sur le corps et la psyché des femmes.