Nouveau guide du Défenseur des droits : les discriminations en raison de l’état de grossesse dans le secteur privé

L’objectif de ce guide est d’informer les acteur·ice·s du monde du travail sur cette discrimination, de fournir des outils juridiques aux victimes et d’accompagner les professionnel·le·s du droit dans l’identification et le traitement de ces discriminations. 

📍Quelles formes peuvent prendre les discriminations en raison de l’état de grossesse, au travail ?

Au travail, la discrimination en raison de l’état de grossesse d’une personne peuvent se manifester sous la forme de : 

  • Offres d’emploi discriminatoires (exemple : mention dans la fiche de poste du sexe ou de la situation familiale des candidat·e·s recherché·e·s) ;
  • Procédures d’embauche discriminatoires (exemple : questions pendant les entretiens d’embauche sur l’état de grossesse présent ou à venir) ;
  • Refus d’embauche discriminatoires (exemple : refus d’employer une personne en raison de l’état de grossesse présent ou à venir) ;
  • Réintégration dans l’emploi (exemple : à la suite d’un congé maternité, refus de réintégrer la personne dans le poste précédent le congé ou dans un poste similaire avec un niveau de rémunération et des fonctions équivalent·e·s) ;
  • Refus de promotion (exemple : refus d’une promotion envisagée pour une personne en raison de la survenance d’un congé maternité) ; 
  • Rupture du contrat (exemple : licenciement d’une personne en raison de son état de grossesse ou de la survenance d’un congé maternité) ;
  • Harcèlement discriminatoire (exemples : « blagues », injures, humiliations, propos en lien avec la situation familiale, le sexe ou l’état de grossesse présent ou à venir)

📍Quels sont les recours possibles pour les personnes s’estimant victimes ? 

Comme le rappelle le Défenseur des droits, une personne s’estimant victime de discrimination en raison de son état de grossesse peut décider de son mode d’action selon la nature des faits et les éléments de preuve dont elle dispose : 

  • Saisir le conseil des Prud’hommes (procédure civile) : L’employeur est notifié par une lettre avec accusé de réception. Une audience est organisée devant le bureau de conciliation et d’orientation. Puis une deuxième audience se tient devant le bureau de jugement. Le délai de prescription est de 5 ans.
  • Porter plainte (procédure pénale) : La victime porte plainte au commissariat, à la gendarmerie ou directement auprès du Procureur de la République. Celui-ci peut décider de classer la plainte sans suite, proposer des mesures alternatives, saisir un juge d’instruction ou engager des poursuites. Le délai de prescription est de 6 ans.

Nous précisions également qu’il est possible de signaler en interne, dans votre structure, une situation de discrimination directe ou d’agissement discriminatoire. Cela peut prendre la forme d’un mail de signalement adressé au service RH ou directement à l’employeur. L’employeur est en effet tenu d’assurer la sécurité et de protéger la santé physique et mentale de ses salarié·e·s. Les délégué·es du personnel peuvent vous accompagner.

📍 Comment prouver les discriminations en raison de l’état de grossesse au travail ? 

En matière civile, “lorsqu’un·e salarié·e présente des éléments de fait laissant présumer l’existence d’une discrimination, il appartient à la partie défenderesse, c’est-à-dire à l’employeur, de démontrer que ses décisions reposent sur des éléments objectifs, étrangers à la discrimination alléguée”. 

Le ou la salarié·e n’a donc pas besoin d’apporter des preuves irréfutables de discrimination. Il ou elle doit seulement constituer un faisceau d’indices afin de faire naître “un doute raisonable” quant à l’existence d’une telle discrimination. C’est ensuite à l’employeur de prouver que la discrimination n’a pas eu lieu. C’est ce qu’on appelle le principe d’aménagement de la charge de la preuve

👉 Parmi les exemples de faisceaux d’indices, le Défenseur des droits cite

  • La chronologie des faits (pour constituer un récit des événements). Par exemple, une rétrogradation qui intervient quelques jours ou semaines après l’annonce du congé maternité, ou dès le retour de congé.
  • Le compte rendu de l’évaluation professionnelle (pour observer les potentielles discriminations sur l’évaluation des salarié·e·s et sur les évolutions de carrières). Par exemple, des indications sur un prétendu manque de motivation lié à la grossesse.
  • Les contrats de travail, les bulletins de paie, les fiches de postes (pour estimer les potentielles offres d’emploi ou les attributions de primes discriminatoires)
  • Les courriels et courriers et SMS (pour constater de propos ou de comportements à caractère discriminatoire qui portent atteinte à la dignité).
  • Les messages vocaux laissés sur un répondeur (pour constater de propos ou de comportements à caractère discriminatoire qui portent atteinte à la dignité
  • Les attestations (témoignages de collègues)

En matière pénale, il n’existe pas d’aménagement de la charge de la preuve en faveur de la victime, contrairement au civil. En effet, “le prévenu étant présumé innocent, la charge de la preuve incombe à la partie poursuivante, c’est-à-dire soit à la victime, soit au ministère public”. 

Le Défenseur des droits explique donc qu’en matière pénale, la personne “doit donc prouver l’élément matériel du délit de discrimination, c’est-à-dire la différence de traitement à laquelle elle est confrontée. Il est également nécessaire, puisque l’infraction de discrimination est une infraction intentionnelle de démontrer l’élément moral du délit”. Comme indiqué, ces éléments pourront être apportés par la victime, mais surtout recherchés par le ministère public lors de l’enquête pénale.

Par contre, le principe de liberté de la preuve s’applique au pénal. Cela signifie que “la discrimination peut être établie par tout mode de preuve et le juge décide d’après son intime convication. Il est par conséquent possible de produire des enregistrements clandestins et/ou autres vidéos réalisés à l’insu de l’auteur présumé de la discrimination”. (Point de vigilance : Ce n’est le cas qu’en matière pénale.)

💡 Sources / Pour aller plus loin :

Le guide du défenseur des droits sur les discriminations en raison de l’état de grossesse : https://juridique.defenseurdesdroits.fr/doc_num.php?explnum_id=21229

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