“Solo Sí es Sí” : le projet de loi sur le consentement sexuel explicite approuvé par les député·e·s espagnol·e·s

TW : Cet article traite de violences sexistes et sexuelles en mentionnant, notamment, un fait de crime sexuel. La lecture peut donc être difficile. 

📍De quoi parle-t-on ? 

Solo Sí es Sí”, “Seul un oui est un oui” en français, est un projet de loi espagnol exigeant “l’obligation d’un consentement explicite” dans le cadre des relations sexuelles. Il s’agit d’un projet porté par la ministre de l’Égalité, Irene Montero, depuis plus de deux ans. 

Le 6 juillet 2021, le Conseil des ministres espagnol a approuvé ce texte de loi. Le 26 mai 2022, les député·e·s l’ont adopté, à la majorité absolue, en première lecture (201 voix “pour”, 140 voix “contre” et 3 abstentions). 

La ministre s’est exprimée sur Twitter en disant : “Aujourd’hui est un grand jour pour toutes les femmes. L’Assemblée a approuvé avec une large majorité la loi ‘Seul un oui est un oui’. Nous le devions à toutes les victimes de violences sexuelles et nous laissons ainsi un meilleur présent et avenir à nos filles, sœurs et amies”. 

📍Pourquoi cette proposition de loi ? 

Cette proposition fait suite à une polémique autour d’une affaire, surnommée “La Meute”. En juillet 2016, cinq hommes avaient violé une jeune femme de 18 ans, lors des fêtes de San Fermín, à Pampelune. Par la suite, pour s’en vanter, les auteurs des faits avaient diffusé des images de leurs agissements sur leur groupe What’App. 

En 2018, ils ont été condamnés à neuf ans de prison pour “abus sexuels” et “abus de faiblesse”. La qualification de viol n’a pas été retenue car la jeune femme n’avait, selon les termes utilisés, “pas clairement affiché son refus”. La vidéo avait été présentée comme une preuve contre eux, mais la victime avait dû justifier, devant la justice, de son apparente passivité, ce qui avait contribué à alimenter la colère de l’opinion publique.

Après de nombreuses manifestations dans tout le pays, les faits ont finalement été requalifiés en tant que viol, par le Tribunal Suprême espagnol, en 2019. 

📍Actuellement, comment est définie la notion de viol dans le code pénal espagnol ?

À ce jour, en Espagne, tout comme en France, la notion de consentement en tant que tel n’apparaît pas dans le code pénal. Dans le code pénal espagnol, l’agression sexuelle et le viol sont définit ainsi :

Article 178 : “Quiconque porte atteinte à la liberté sexuelle d’une autre personne, en usant de violence ou d’intimidation, est puni comme responsable d’une agression sexuelle de la peine d’emprisonnement de un à cinq ans”.

Article 179 : “Lorsque l’agression sexuelle consiste en un accès charnel par voie vaginale, anale ou buccale, ou l’introduction de membres corporels ou d’objets par l’une des deux premières voies, le responsable est puni comme auteur du viol de la peine d’emprisonnement de six à douze ans”.

Aujourd’hui, les définitions de l’agression sexuelle et du viol en droit espagnol reposent sur la notion de violence et d’intimidation. Ce projet de loi impliquerait donc une modification du code pénal espagnol pour introduire la notion de consentement. 

Pour rappel, en France, un viol est définit comme “tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise”. 

📍Qu’est-ce que cette nouvelle loi changerait concrètement ? 

Selon Irene Montero, “Cette loi place le consentement au centre, ce qui signifie que les victimes n’auront plus à démontrer qu’elles ont résisté, qu’il y a eu violence ou qu’elles se sont senties intimidées. L’idée n’est plus de prouver la soumission de la victime, mais le consentement, et tout ce qui n’implique pas un consentement explicite de la part de la femme est considéré comme une agression sexuelle, éliminant également la différence entre abus et agression sexuelle”. 

Avec cette loi, tout acte sexuel non consenti de manière libre et claire pourra être dorénavant considéré comme un viol. Il n’y aurait donc plus besoin de prouver que l’acte a été commis avec violence ou intimidation. 

Pour être adopté en Espagne, ce texte de loi doit maintenant passer devant le Sénat. 

🚨Si vous êtes confronté·e·s à des violences sexuelles, voici quelques contacts d’associations spécialisées qui peuvent vous aider : 

  • Le 39 19 : plateforme d’écoute nationale, gratuite, anonyme, ouverte 24h/24 et 7j/7. 
  • Le CFCV :  0 800 05 95 95 : ligne d’écoute, gratuite, anonyme et confidentielle, ouverte du lundi au vendredi, de 10h à 19h.
  • Le tchat « Comment on s’aime » d’En Avant Toutes : des professionnel·le·s à l’écoute et bienveillant·e·s, disponibles du lundi au samedi, de 10h à 21h.

💡 Sources / Pour aller plus loin

Un article de Euronews sur l’adoption du projet de loi : https://fr.euronews.com/2022/05/27/en-espagne-seul-un-oui-est-un-oui-les-deputes-durcissent-la-loi-contre-le-viol

Le discours de Irene Montero pour l’adoption de la loi à l’Assemblée (en espagnol) : https://twitter.com/IreneMontero/status/1529848258150932480?cxt=HHwWgICxtdS4jrsqAAAA

L’article 222-23 du code pénal qui définit le viol en France : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000043409305/

__________________________________

→ Vous souhaitez sensibiliser vos équipes à la prévention des violences sexistes et sexuelles ? Contactez le groupe Egaé en envoyant un mail à contact@groupe-egae.fr, nous pouvons vous accompagner !