Arrêt de la Cour de cassation rendu le 14 septembre 2022, n°21-12.175
📍Que s’est-il passé dans cette affaire ?
L’affaire concerne une société qui emploie, entre autres, au moment des faits, quatre personnes occupant le même poste.
Parmi ces quatre personnes, trois relèvent de la même classification, et seule l’une des trois relève d’une classification supérieure.
📒 Les classifications, c’est quoi ?
Les classifications, dans cette société, constituent un « socle » qui déterminera, principalement, les salaires versés. Plus la classification est élevée, plus le salaire est élevé. Ainsi, ici, l’une des trois collègues est mieux rémunérée que les autres.
📍Quel est l’enjeu dans cette affaire ?
Dans cette affaire, l’une des trois salarié·es à la classification moins élevée rouleurs a estimé qu’en lui accordant une classification inférieur à celle de sa collègue, la société avait commis une différence de traitement injustifiée.
🎓 Comment la société a-t-elle justifié cette différence ?
Pour sa défense, la société a argué que la personne la mieux classifiée était aussi la seule personne à posséder un diplôme parmi les quatre personnes concernées, et que c’était pour cette raison qu’elle bénéficiait d’une meilleure classification.
🤔 Qu’en pense la cour de cassation ?
Dans cet arrêt, la Cour de cassation indique que :
Vu le principe d’égalité de traitement (…) Il résulte de ce principe que la seule différence de diplômes ne permet pas de fonder une différence de traitement entre des salariés qui exercent les mêmes fonctions, sauf s’il est démontré par des justifications, dont il appartient au juge de contrôler la réalité et la pertinence, que la possession d’un diplôme spécifique atteste de connaissances particulières utiles à l’exercice de la fonction occupée.
Cass. Soc. 14 septembre 2022, n°21-12.175
Autrement dit, la différence de diplômes ne peut justifier une différence de traitement entre plusieurs salarié·es exerçant les mêmes fonctions que si le diplôme spécifique atteste de connaissances particulières concernant la fonction occupée.
En somme, la simple différence de diplômes ne permet pas à la société en cause de justifier la différence de classification entre les personnes concernées. Une société ne peut accorder un traitement différent à un·e salarié·e que si elle prouve qu’au-delà d’être titulaire d’un diplôme, le diplôme en question lui apporte des connaissances particulières utiles à l’exercice de la fonction occupée, que ne possèdent pas les autres collègues.
Or, ici, la Cour de cassation considère que la société n’a pas apporté la preuve que ledit diplôme aurait apporté des connaissances particulières à la personne concernée.
Ainsi, la différence de traitement fondée sur la seule existence du diplôme n’est pas justifiée.em
🤔 Est-ce que la salariée a été victime d’une discrimination ?
En l’espèce, aucune des parties de l’affaire n’a invoqué de discrimination : la différence de traitement n’était pas basée sur un critère discriminatoire.
Cependant, on peut se demander quel serait l’impact de l’application du principe posé ci-dessus dans les futures situations où ce serait le cas.
En effet, selon la loi et la jurisprudence, en matière de discrimination, le·la salarié·e ou l’agent·e qui s’estime victime d’une différence de traitement discriminatoire doit apporter « les faits qui permettent d’en présumer l’existence ». Puis, en termes de procédures, c’est ensuite à l’employeur de « prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination » (article 4 de la loi du 27 mai 2008).
👥 Qu’est-ce que ça signifie ?
Concrètement, cela signifie que si une personne est moins bien rémunérée ou moins bien traitée qu’une autre au travail, et que cette personne estime que cette différence de traitement est basée sur un critère discriminatoire (son sexe, son origine, son orientation sexuelle…), cette personne pourrait agir en justice, et l’employeur devrait apporter la preuve que la différence de traitement est justifiée par des éléments objectifs.
Or, la jurisprudence du 14 septembre 2022 nous indique qu’une simple différence de diplôme n’est pas un élément objectif justifiant une différence de traitement.
L’employeur ne pourrait donc pas invoquer le fait que telle personne est plus ou moins diplômée pour prouver une absence de discrimination : ce dernier devrait, en plus, démontrer que les diplômes concernés ont apporté à un autre salarié « connaissances particulières utiles à l’exercice de la fonction occupée », et que c’est sur cela que se base la différence de traitement.
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