📌De quoi parle-t-on concrètement ?
Pour comprendre cette proposition de loi, il semble nécessaire de remonter 80 ans en arrière : c’est le régime de Vichy, et plus particulièrement la loi du 6 août 1942, qui établit différentes majorités sexuelles pour les personnes hétérosexuelles et homosexuelles.
« Sera puni d’un emprisonnement de six mois à trois ans et d’une amende de 2 000 francs à 6 000 francs quiconque aura soit pour satisfaire les passions d’autrui, excité, favorisé ou facilité habituellement la débauche ou la corruption de la jeunesse de l’un ou de l’autre sexe au-dessous de vingt et un ans, soit pour satisfaire ses propres passions, commis un ou plusieurs actes impudiques ou contre nature avec un mineur de son sexe âgé de moins de vingt et un ans. »
Ainsi, en 1942, les relations sexuelles consenties entre deux personnes du même sexe de moins de 21 ans sont désormais interdites. À contrario, cet âge de consentement est fixé à 13 ans pour les personnes hétérosexuelles (puis 15 ans en 1945).
À celà s’ajoute également l’outrage public à la pudeur, défini dans l’article 330 du code pénal (depuis abrogé). L’alinéa 2 vient doubler la peine minimum pour outrage public à la pudeur, lorsqu’il s’agissait de rapports homosexuels, créant de fait un “caractère aggravant d’homosexualité”.
Cette législation, par nature discriminatoire, restera en vigueur pendant 40 ans. De 1942 jusqu’en 1982, la France condamne alors des milliers d’hommes gays pour acte “contre-nature” ou “impudique” avec un personne de même sexe, de moins de 21 ans.
Les conséquences de cette pénalisation sont multiples : constitution de fichiers de police, condamnations à des peines d’emprisonnement ou à des amendes, dénonciations aux forces de l’occupation, licenciements abusifs, jugement social, etc.
Selon les sociologues Régis Schlagdenhauffen et Jéremy Gauthier, “entre 1942 et 1982, plus de 10 000 personnes ont été condamnées pour des actes homosexuels”, au titre de la loi du 6 août 1942. “À cela il conviendrait d’ajouter les personnes condamnées pour outrage public à la pudeur “homosexuel” dont, selon les estimations provisoires produites par Régis Schlagdenhauffen, le nombre d’hommes et de femmes condamnés pour ce motif pourrait s’élever à 50 000.«
Il faut attendre le 4 août 1982 pour que ces dispositions soient abrogées.
📌Que s’est-il passé cet été, au Sénat ?
Le 6 août 2022, le sénateur du parti socialiste de l’Hérault, Hussein Bourgi, a déposé une proposition de loi portant réparation aux personnes condamnées. Ce sénateur encourage la France à rendre « justice aux dernières victimes encore en vie”. Il précise ensuite : “En « leur accordant justice et réparation c’est leur identité que nous respecterons et leur dignité que nous restaurerons ». Le texte en question fait écho à une tribune publiée dans Têtu, le 15 juin 2022, à l’initiative de plusieurs associations.
📌Que peut-on trouver dans cette proposition de loi ?
Dans la proposition de loi, l’État reconnait la criminalisation et la discrimination envers les personnes homosexuelles et propose réparation dans les conditions suivantes :
“Les personnes reconnues victimes d’une discrimination en application de l’article 1er ont droit au bénéfice des mesures suivantes :
1° Une allocation forfaitaire fixe de 10 000 euros ;
2° Une allocation forfaitaire variable en fonction du nombre de jours de privation de liberté, fixée à 150 euros par jour ;
3° Le remboursement du montant de l’amende dont elles se sont, le cas échéant, acquittées en application de leur condamnation, actualisé dans des conditions fixées par décret.”
Cette proposition de loi inclut également l’ajout d’un article dans la loi du a loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. L’objectif serait de condamner celles et ceux qui ont contesté, nié, ou banalisé de façon outrancière “l’existence de la déportation de personnes en raison de leur homosexualité” pendant la Seconde Guerre Mondiale.
💡Sources / Pour aller plus loin :
La proposition de loi du 6 aout 2022 : https://www.senat.fr/leg/ppl21-864.html
La Tribune du 15 juin 2022 : https://tetu.com/2022/06/15/appel-tetu-petition-homophobie-etat-france-reconnaissance-victimes-histoire-repression-anti-gay/
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